Critiques littéraires de l’hiver 3.
Le rêve du jaguar/ Indira GANDHI/ L'Inde de MODI/ Aventuriers, pèlerins, puritains, les mythes fondateurs de l'Amérique.
Critiques personnelles de livres lus. Les propos appartiennent à l’auteur de ce blog.
- Le rêve du jaguar de Miguel BONNEFOY : Antonio est recueilli par une dame aveugle devant une Eglise à Maracaibo au Venezuela. Il vit de petits métiers notamment dans un hôtel puis rencontre Ana Maria. Ils font tous les deux des études de médecine et lui fait aussi de la politique. Il sera emprisonné et à sa sortie naitra une petite fille Venezuela. Venezuela grandit avec sa grand-mère Eva Rosa, rencontre un révolutionnaire chilien puis part vivre à Paris. Là-bas elle donne naissance à Cristobal. Antonio finit sa vie avec tous les honneurs de sa profession et de la nation puis Cristobal retourne au Venezuela chez sa grand-mère. Il rêve d’écrire un livre sur sa famille mais aide les paysans révolutionnaires. Sa grand-mère meurt l’année où Chavez prend le pouvoir et Cristobal, désormais garant de la mémoire familiale, décide d’écrire un livre sur sa famille. Cristobal, c’est le double fictionnel de l’auteur qui raconte ici l’histoire de sa famille, ce roman étant largement autobiographique. Miguel BONNEFOY crée une atmosphère très plaisante, proche d’un Gabriel Garcia MARQUEZ. Les récits se succèdent habilement pour raconter l’histoire de toutes les générations de la famille. Les personnages sont attachants et apprend beaucoup de choses sur l’histoire du Venezuela. Le style est très léché, parfois poétique. Un gros coup de cœur pour ce rêve du jaguar très réaliste qui a reçu le prix Femina en 2024. A lire. Ouvrage disponible en médiathèques et en librairies.
- Indira GANDHI de François GAUTIER : Indira GANDHI est la fille de NEHRU. Elle grandit en partie en Europe (Suisse) puis suis les enseignements de son mentor, le mahatma Gandhi. En 1947 a lieu la partition de l’Inde britannique et NEHRU devient premier ministre de l’Inde Continentale. NEHRU bien que non aligné a une politique qui se rapprocherait de l’URSS sans être une dictature pour autant. Comme GANDHI, NEHRU prône la non-violence et n’arme pas son armée. Il subit une défaite militaire face à la Chine qui ne supporte pas que le Dalai Lama est trouvé refuge en Inde. Quand Nehru meurt, Indira sa fille devient première ministre. Elle nationalise les banques, dote l’Inde de l’arme nucléaire, prend part avec plus ou moins de succès aux soubresauts dans la Cachemire, région limitrophe du Pakistan et que les deux pays se disputent. Sa fin de premier mandat est marquée par des grèves et par des problèmes au Cachemire et Indira GANDHI doit gouverner d’une main de fer. Elle perd les élections de 1977. Mais l’Inde commence à s’enfoncer dans un quasi chaos et Indira GANDHI est réélue en 1980. Son second mandat est beaucoup plus difficile car elle se heurte aux séparatistes sikhs qui au départ ne supporte pas la transformation de la culture vivrière de l’Inde en culture commerciale et intensive. Les échanges sont donc musclés avec les sikhs avec pour point d’orgue l’attaque du Temple d’or dans le Penjab qui fait beaucoup de morts. En 1984, Indira GANDHI est assassinée par ses deux gardes du corps sikhs. Son fils Rajiv devient premier ministre mais meurt dans un attentat tamoul au Sri Lanka en 1991. Aujourd’hui, le séparatisme sikh pose toujours des problèmes en Inde. Une biographie sur ce personnage méconnu en Occident très intéressante, très claire, écrit avec beaucoup de pédagogie et surtout plutôt factuelle. L’auteur qui réside en Inde depuis très longtemps ne fait ni un portrait hagiographique, ni une diatribe mais montre à la fois les parts de lumière et les parts d’ombre de celle qu’on a appelé « la mère de l’Inde ». A lire. Ouvrage disponible en médiathèques et en librairies.
- L’Inde de Modi de Christophe JAFFRELOT : Cet essai montre d’abord comment le parti BJP de MODI s’est d’abord implanté dans l’état du premier ministre à savoir le Gunjab. En élu local, MODI s’oppose et stigmatise les musulmans. En 2014, il gagne les élections nationales et devient premier ministre dans un contexte de déviance des élites et un terrain favorable à son parti car beaucoup d’attentats terroristes en Inde à cette époque. Une fois Modi au pouvoir, l’essai montre que l’Inde tend peu à peu à devenir une démocratie ethnique où l’on vante le pan hindouisme, où l’on se méfie des universitaires et des ONG avec un lynchage médiatique et numérique de ces derniers, où l’on met au ban de la société les musulmans et les chrétiens. Le pouvoir exécutif se rapproche de la police et de la religion comme c’est le cas dans l’Etat de l’Uttar Pradesh aux mains d’un religieux hindou. Mais est-ce toujours une démocratie ou l’Inde tend-elle à devenir une dictature ? L’essai de JAFFRELOT pose la question en dernière partie d’ouvrage sans vraiment y répondre. Il répond que l’Inde se transforme. En outre, l’essai reste dans le factuel et ne fait à aucun moment l’apologie de MODI et de son parti. On note aussi de nombreuses redondances dans le récit mais cela permet au lecteur de bien comprendre les enjeux de l’Inde actuelle car il s’agit d’un pays compliqué aux niveaux à la fois politique, social, religieux et culturel. Pour ma part, cet essai m’a plutôt intéressé car on apprend plein de choses sur l’Inde d’aujourd’hui qui comme beaucoup de pays voit son modèle démocratique bien menacé. A lire avec un esprit critique bien sûr. Ouvrage disponible en médiathèques et en librairies.
- Aventuriers, pèlerins, puritains, les mythes fondateurs de l’Amérique d’Agnès DELAHAYE : Cet essai montre comment les premiers colons (John Smith, les Pilgrims Fathers, Les puritains) ont façonné l’identité politique et religieuse des Etats Unis tout en pointant du doigt les méfaits de la colonisation britannique. Ouvrage que l’on peut oublier car il n’apporte rien de nouveau à ce que l’on sait déjà à savoir que l’Amérique s’est créé dans le sang et qu’il s’agit d’un état libéral, puritain. Ouvrage disponible en médiathèques et en librairies.